Contribution de Pierre Laurent – 9 décembre 2024
Après avoir vu sa politique sévèrement rejetée par les Français dans les urnes en mai dernier, Emmanuel Macron organise depuis six mois une grande confusion politique pour tenter de remettre en selle l’orientation qui a mené le pays dans la crise actuelle. La dissolution a été l’acte 1 : échec. Le gouvernement Barnier a été l’acte 2 : échec à nouveau consommé, malgré une honteuse tentative de collusion avec l’extrêmedroite. Il réaffirme alors une nouvelle fois à la télévision son refus de changer de cap. Et il utilise aujourd’hui l’instabilité qu’il a lui-même provoquée pour relancer son projet de toujours, une alliance mêlant droite et gauche pour relancer l’adhésion aux politiques de soutien au capital. Il faudrait sauver la stabilité du pays, foutaise ! En vérité la stabilité de ses seuls choix politiques. Or ce sont ces choix et le chantage des marchés financiers pour préserver leurs indécents taux de rentabilité qui sont en réalité la source de tous les blocages. Tant que dureront ces choix, l’instabilité politique sera chronique, car l’immense majorité des Français ne les acceptent plus. Voilà la vérité. Pour sortir de la crise actuelle, il faut en revenir à ce qu’ont dit les Français dans les urnes. C’est cela la démocratie. Deux messages principaux en étaient sortis : premièrement il faut changer de cap politique pour répondre aux grandes urgences sociales du pays ; deuxièmement, la solution à cette attente de changement n’est pas le recours à l’extrême-droite. C’est ce qu‘a exprimé le barrage républicain des électrices et électeurs. Aucun des deux messages ne doit être oublié. Voilà pourquoi le chemin de sortie de crise se trouve, non dans une union sacrée de droite et de gauche, mais dans la construction d’une nouvelle politique sociale et démocratique et pourquoi les forces de la gauche du Nouveau Front populaire sont celles autour desquelles peut s’organiser ce nouveau cap. Le problème n’est pas dans le compromis, il y en a toujours en démocratie, ce qui compte c’est le sens de la direction prise. Certes, il n’y a pas de majorité absolue pour l’heure. Mais le plus sûr chemin pour en construire une, même relative pour les mois à venir, c’est de ne pas biaiser avec ces exigences, sinon la colère sociale grondera, l’échec recommencera et l’instabilité perdurera d’une manière ou d’une autre. Pour soulager le pays, les communistes n’ont rien de mieux à faire que de refuser tout choix ou tout attelage qui braderait la résolution des urgences sociales du pays. Car c’est ce déni qui met le pays en tension. Il n’est nul besoin non plus d’un pacte de non-censure. Bien entendu, les communistes, en responsabilité, ne sont pas pour agiter la censure à tout bout de champ comme un enfant colérique agiterait son hochet. Mais pourquoi en revanche priver le Parlement d’un des rares pouvoirs qui lui restent dans la Constitution pour se faire entendre, si nécessaire, d’un Président omnipotent et sourd aux attentes du pays ou d’un gouvernement toujours prêt à dégainer un 49-3. C’est en plus une erreur de raisonner comme si le vote de juin a figé pour l’éternité le rapport de force dans le pays dans une instabilité chronique. Le renoncement aux solutions sociales serait dès lors le prix à payer pour la stabilité. Mais c’est une illusion qu’entretient Emmanuel Macron pour faire revenir le jeu à la case départ. Sortir de l’instabilité, c’est au contraire accepter des changements importants que les Français ressentiront concrètement dans leurs vies. Et à terme, pour redonner au pays une majorité plus stable, une nouvelle dissolution sera inévitable pour permettre aux Français de choisir dans la clarté et non au forceps comme cela a été le cas en juin dernier. C’est donc vers le peuple pour mener en grand ce débat qu’il faut d’urgence se tourner. Notre tâche est de poursuivre sans relâche le rassemblement d’une majorité populaire, et demain parlementaire, autour d’une politique enfin résolument sociale et démocratique. Faire de la politique au coeur de mouvements populaires que nous devons contribuer à animer est le bon chemin pour faire évoluer la situation. Pour parvenir à cela, une élection présidentielle anticipée me paraît être illusoire et dangereuse. Illusoire car c’est s’en remettre à la seule volonté d’Emmanuel Macron pour déclencher l’agenda politique. Dangereuse, car une élection dans laquelle la seule à être certaine de se qualifier au second tour s’appelle Marine Le Pen sera inévitablement détourner de son sens. Seul le choix de celui ou de celle qui serait capable de l’affronter concentrerait tous les pronostics. Avec un vote utile puissance dix à la clé, et un résultat des plus hasardeux. Mieux vaut reprendre le débat avec le pays là où il a été bâclé en juin dans une dissolution surprise, en vue de nouvelles élections législatives pour choisir de quelle majorité et pour quel projet de société nous voulons pour la France. De ce débat ne nous détournons pas un seul instant. Dans les luttes comme au Parlement. Maintenant pour contribuer à des votes positifs dans l’intérêt du pays quand ils seront possibles, et le plus vite possible pour choisir de manière assurée avec les Français un nouveau cap social et démocratique. Pour y parvenir, l’union des forces qui ont constitué le Nouveau Front populaire restera indispensable et restera toujours un combat. Emmanuel Macron avait déjà tout fait pour la rendre impossible avant la dissolution. Il ne croyait pas au NFP et ce fut son erreur. Il a repris aujourd’hui l’offensive de division avec le même objectif, ouvrir les voies de sa recomposition politique. En réalité, le contenu des mobilisations sociales en cours comme les votes effectués par les parlementaires du NFP pendant le débat budgétaire avorté ont montré beaucoup plus de cohérences possibles que toutes les petites polémiques médiatiques. Nous ferions bien d’en parler pour éclairer le débat. Oui, stop à la grande confusion organisée! Donnons de la hauteur au débat et cessons de balloter au milieu des effluves des cuisines politiciennes de l’Elysée et d’ailleurs