Frantz Fanon a écrit : « Chaque génération doit, dans une relative opacité, affronter sa mission : la remplir ou la trahir. »
Le système actuel en crise brutalise le peuple. Le changement climatique menace partout et tout le monde. Nous sommes sur un volcan. Le compte à rebours est enclenché. Ici comme ailleurs, le système est prêt à intégrer l’extrême droite à ses calculs de sauvegarde.
Nous faisons face, comme chaque génération, aux désordres du monde, et une seule question demeure : trahir ou servir notre mission.
Ces lignes sont écrites avec la conviction que les crises climatique et énergétique concentrent l’essentiel des enjeux de la guerre et de la paix, de la démocratie, de la justice sociale et de l’habitabilité du monde. La tâche des générations présentes est d’ouvrir la voie du grand saut civilisationnel qui, en engageant les transformations nécessaires pour le climat et le vivant, engageront nécessairement les sociétés humaines dans un nouveau devenir, un nouveau cadre de valeurs et de références culturelles, économiques et sociales. Climat et justice sociale sont les piliers inséparables de l’avenir. J’écris avec la conviction que le service de la France et des idéaux humains les plus élevés appelle les communistes français et toute la gauche à un effort nouveau. J’écris avec l’ardente espérance que ma famille, le communisme français, répondra à l’appel du devoir. Voici, à mes yeux, les quatre fractures actuelles et les bifurcations nécessaires.
Première fracture. Nous ne sommes pas seulement dans l’anthropocène, c’est-à-dire une époque géologique caractérisée par l’avènement des humains comme principale force de changement géophysique. Nous sommes dans le capitalocène. Le désastre présent est le produit d’un système social qui porte un nom : le capitalisme. Nous vivons depuis un siècle dans le cadre monolithique de la croissance du capital. Ce système a produit notamment un nouveau cadre culturel, le consumérisme de masse. Notre pain quotidien est délivré par une machine publicitaire implacable. La destruction du vivant est le mode de fonctionnement standard du capitalisme.
Deuxième fracture. Nous n’avons pas le temps d’attendre. Les discours lénifiants sur la sensibilisation de la jeunesse masquent mal nos renoncements. Ou encore l’épuisant « chacun·e fait à son échelle ». Stop. Le problème est beaucoup plus simple : un programme d’action gouvernementale doit être écrit à partir de l’échelle où se posent les problèmes. Nous devons à court terme de dix ans planifier la bifurcation du système. Et à cette échelle, concrète, les problèmes de choix d’investissement, d’orientations en matière d’énergie, d’industrie, deviennent plus simples et évidents.
Troisième fracture. L’ère de l’individualisme, la disqualification de l’effort collectif est l’une des victoires du capitalisme libéral. Et l’une de nos impasses. Et voici que des millions d’humains sont individuellement pénétrés de leur puissante originalité, tout en produisant et en consommant les mêmes opinions éphémères, les mêmes objets de grande consommation, la même agressivité. Cette ère est celle de l’anesthésie des forces collectives et de la politique-spectacle. Il n’existe aucun raccourci. Il faut en finir avec l’illusion médiatique. Sans pensée, sans travail, sans formation, en d’autres termes sans stratégie politique, nous sommes condamnés à l’insignifiance.
Quatrième fracture. Ce que l’on appelle communément la gauche et les écologistes sont condamnés à s’unir. Ou à périr. Et avec eux l’espérance. S’unir pour réussir. La solution est dans ce camp, et nulle part ailleurs. Maire de Montreuil et président d’une communauté de 400 000 habitant·e·s, nous sommes unis avec toute la gauche politique et citoyenne. Une union véritable, honnête est possible. Si réellement nous pensons que notre monde est en danger, alors nous devons créer sans attendre les conditions pour poursuivre l’effort de rassemblement amorcé avec les élections législatives pour, le temps venu, donner à la France le gouvernement de toute la gauche sociale et écologiste. La logique d’affrontement doit céder la place à la logique d’inclusion. Nous devons dès maintenant rassembler les résistances sociales, préparer l’après-Macron et plus encore la rupture d’avec l’ère du capital.
L’histoire humaine détruit implacablement ce qui ne sert pas le mouvement des forces sociales. Depuis toujours, un seul choix est proposé aux femmes et aux hommes qui ont fait le choix de servir : élever leur pensée et leurs actes au plus haut de l’intérêt général humain. C’est la raison d’être des communistes.